Interview Dr Celine BONNET « … un grand pas en avant dans la professionnalisation »

Interview Dr Céline BONNET

Bonjour Céline. Peux-tu te présenter ?

Je m’appelle Céline Bonnet, j’ai 33 ans. Je suis Médecin Urgentiste aux Hôpitaux du Léman depuis novembre 2010. Je suis revenue m’installer dans mes montagnes après mes études, et mon choix s’est tout naturellement orienté vers Thonon… Après 5 ans à exercer la Médecine d’Urgence, j’ai décidé d’élargir mon horizon et de me former en Médecine du Sport, étant moi-même sportive et entourée de sportifs. J’ai donc passé la Capacité de Médecine du Sport, et partage depuis octobre 2015 mon temps professionnel entre les Urgences de Thonon et des consultations de Médecine du Sport, aux Hôpitaux du Léman toujours. Il s’agit d’une consultation publique, ouverte à tous les sportifs (plus d’info sur www.doctolib.fr) 😉 .

J’ai médicalisé plusieurs matchs des Black Panthers, pour les sections jeunes, depuis mai 2012. Et je suis depuis cet automne plusieurs joueurs du groupe Elite, en lien avec Mickaël Gérin, préparateur physique, et Jean-Marie Bouvard, kinésithérapeute.

La « Cellule Médicale » du club a été solidement renforcée avec ton arrivée, venant étoffer le staff composé de de Fréderic Abello (kiné), Mickaël Gérin (préparateur physique), et Jean-Marie Bouvard (kiné historique du club). Quel est ton rôle exactement ?

Ma fonction au sein de cette Cellule Médicale est double.

Tout d’abord, m’assurer, avant la saison, que les joueurs ne présentent pas de contre-indications à la pratique du Foot US. Consultation souvent considérée comme simple formalité, à la fois par l’athlète et son médecin, la visite de non contre-indication a un rôle majeur de prévention et d’éducation. Nous aurions pu, comme nos confrères anglo-saxons, laisser la responsabilité pleine et entière de tout incident au sportif. En France, l’obtention d’une licence est soumise à un examen médical de non contre-indication (qui n’est pas une visite d’aptitude). Le Ministère en charge des Sports (dont le nom change en fonction des gouvernements…), en collaboration avec les Fédérations Sportives et le Comité National Olympique et Sportif Français, entend ainsi diminuer les accidents « prévisibles », notamment cardio-vasculaires, liés à la pratique du sport. La visite de non contre-indication est également le bon moment pour aborder la préparation du sportif, son ressenti par rapport au sport, et donner quelques conseils, notamment en matière de nutrition et de vaccination.

Ensuite, prendre en charge les blessures en cours de saison. Le travail en équipe est ici primordial. Il n’est pas rare que le sportif, ou son encadrement, veuille aller plus vite que la musique, espérant un retour au terrain avant même que le diagnostic soit posé… Or, la plupart des blessures liées au sport (entorses, tendinites, déchirures musculaires) nécessitent un temps de guérison, qui est en moyenne de 6 semaines. Ce délai peut être très nettement réduit, de 50% voire plus, si la prise en charge est précoce et pluridisciplinaire. Mon rôle est ici de poser un diagnostic précoce et de coordonner le retour au jeu, en lien constant avec le kinésithérapeute et le préparateur physique. Cette prise en charge nécessite bien entendu l’adhésion de l’athlète et du coaching staff.

 

Tu as malheureusement eu pas mal de travail en ce début de saison avec le groupe Elite. Quelles sont les blessures les plus récurrentes ?  Des conseils pour éviter ce qui est évitable ?

Les blessés ont en effet été nombreux à l’automne et au début de l’hiver. Entorses, lésions musculaires (allant de la simple élongation à la rupture), luxations… Genoux, chevilles, épaules, muscles divers et variés… A chaque blessure, un traitement spécifique et notamment un programme de réathlétisation.

Quant au moyen d’éviter la blessure… La préparation physique est ici la clef. Le sport de haut niveau, quelle que soit la discipline, est exigeant. Le développement de tel ou tel groupe musculaire doit être adapté en fonction des traumatismes attendus (et donc du poste sur le terrain). Les antagonistes travaillés autant que les agonistes. Le cardio est indispensable, même si c’est parfois difficile à faire comprendre à l’athlète. Un bon cardio permettra d’être aussi performant au début du 1er quart temps qu’à la fin du 4ème… Et également d’éviter les blessures de fin de match, la fatigue étant un facteur favorisant majeur. Et bien entendu, l’hygiène de vie doit être irréprochable !

Y-a-t-il des projets que tu souhaites mettre en place pour des joueurs ou des coaches ?

Bien sûr !

J’aimerais beaucoup travailler avec les sections jeunes, afin de leur expliquer les principes de la Médecine du Sport. Parler avec eux de principes de prévention des blessures élémentaires. En sport comme ailleurs, plus l’athlète est éduqué tôt, plus l’adhésion est forte. Certaines choses difficiles à expliquer à certains anciens (pas tous, hein, certains écoutent… un peu…) sont déjà acquises par les cadets ou les juniors !

J’aimerais également sensibiliser les joueurs et les coaches à la prise en charge des traumatismes crâniens. Les fameuses commotions cérébrales… La 1ère question qui m’a été posée, lors du 1er match que j’ai médicalisé : « Et sinon, les « commos », tu sais faire ? » Oui, je sais faire. Mais c’est avant tout au coach de ne pas remettre sur le terrain un joueur traumatisé crânien, le Second Impact Syndrome étant maintenant bien documenté. Et de faire en sorte que l’athlète soit vu par un médecin rapidement. Le mieux étant bien entendu d’avoir un médecin sur le terrain !

Avec la mise en place de cette Cellule Médicale, les Black Panthers font un grand pas en avant dans la professionnalisation de leur sport. Charge aux joueurs et aux coaches d’utiliser cet outil au mieux. Et aux dirigeants de nous donner les moyens d’une prise en charge optimale !

Un mot pour la fin ?

J’vous vois à Paris, les mecs !